Le testament du pâtre
Décembre 1998, l’auteur originaire du Nyong Ekellé John Françis Shady Eone quitte ce monde en laissant la communauté des poètes Camerounais attristée .Mais au-delà, son œuvre poétique « Le testament du pâtre » paru en 2005 aux éditions clé et de la Ronde à Yaoundé permet de mieux pénétrer le personnage énigmatique dont la mort le fût toute aussi.
Sorti du tiroir de la « Ronde des poètes », collectif de poètes camerounais, le récit de Shady Eone émeut tant par son absence que par la plénitude de sa vision. Le Cameroun est au centre de son élan poétique. Dans cette œuvre vivante, électrique et accrocheuse, l’auteur évoque avec beaucoup de peine la situation cancéreuse, l’ignominie de son triangle natal :
La plaine Tikar et ses peines alvéoles
D’énergie en attente
Tibati où tout n’est pas encore bâti
Monatélé attelé à ses stèles de progrès
Bertoua à qui l’on a dit tais-toi et perds-toi
Banganté qui souffle sur son banc ganté
Edéa partout privé de tout idéal
Makak qu’on enlaidit comme un macaque
Kumba qui encaisse des coups bas et
Limbé de tout malheur imbibé.
Et que dire de ces valeureux combattants de causes nationalistes et de liberté étouffée au prix de l’ingratitude : Ruben Um Nyobé, Ernest Ouandié, Roland Moumié !
Visionnaire l’auteur va jusqu’à souhaiter de meilleurs lendemains pour son pays qui vit sous médicaments :
Ö mon triangle
Ton futur sera luxueux comme un matin de
Carnaval
Ton futur sera opulent comme le corps d’une
Sirène pubertaire
Son préfacier Anne Cillon Perri, lui-même illuminé poète, n’a pas manqué de souligner à juste titre que l’auteur « parce qu’il était si lunatique (…) pouvait se lever un matin et décréter qu’il a tellement évolué dans la pensée que l’idéologie qui sous-tendait son livre la veille ne correspond plus à ses convictions intimes (…) ». C’est dire que l’auteur devait compter parmi les meilleurs, dommage ! Tout comme l’auteur Antoine Logmo Assoumou, Shady est l’auteur d’un seul recueil posthume. « Le testament » habituellement constitué à titre posthume n’est-il pas évocateur d’un destin tout tracé ? Au détour de ce vers :
Et moi
Les mains ouvertes aux puissances du vent
Et moi
Les yeux bandés vers l’horizon devant
Et moi
La bouche joyeuse et le trophée de ma
Victoire sur le podium de ma vie
Je m’en vais
Je m’en vais
L’auteur plonge dans un trou béant au firmament de sa plume. Cette déclinaison du cri, des méandres, de l’espoir et du testament participe à poser les jalons d’un style poétique où les cycles viendraient rendre inextinguibles les idéologies et les convictions des auteurs calfeutrés.
Par d’almeida kouakou joachim
Poète en devenir
MINEE-Yaoundé
En mémoire à Jonh Françis Shady Eone
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